Présentation du projet de recherche sur le JDA - expérimentation du journal des apprentissages

Objectif général d’expérimentation et de formation : Il y a dans l’acte d’enseigner une obligation à mettre les élèves en situation de « se décoller » de la matérialité de la tâche scolaire, à sortir du faire pour penser ce qu’ils ont effectué. Conduire les élèves à interroger ce qu’ils font et le résultat produit nous semble un impératif didactique (quelle que soit la discipline enseignée). (…) Les élèves ne doivent pas se contenter d'appliquer la tâche scolaire demandée (compléter un texte à trous, relier des propositions par des flèches, par exemple), il convient qu'ils exercent des activités de pensée sur ce qu’ils font, qu’ils en saisissent la signification. De la sorte, les élèves doivent aller au-delà du côté conjoncturel de la tâche, dépasser le stade du faire. Cela forme en didactique la secondarisation qui permet la conceptualisation, la formation de concepts. (…) Nous pensons que le discours d'explicitation en est un instrument facilitateur, avec un questionnement du type : « Qu'ai-je fait ? De quoi s’agit-il ? Comment ai-je agi ? À quoi ça sert ? Qu'est-ce que je retiens ? » Si l'élève cherche à réussir une tâche sans s'interroger sur l'objet dont la tâche n'est que le support pour apprendre, la visée de secondarisation sera manquée, et l'apprentissage improbable. L'objectif est que l'élève saisisse l'enjeu de la tâche scolaire : un objet de savoir qu’il convient d’assimiler. (…) Nous postulons que le journal des apprentissages est un artefact pertinent pour conduire les élèves à un questionnement sur ce qu’ils apprennent. Nous nous proposons de reprendre ce dispositif déjà testé par Crinon et Maillard. Pour Crinon (2008), le journal des apprentissages témoigne du pouvoir du langage écrit en tant qu’outil intellectuel, une rigueur de formulation (à apprendre) qui stimule la réflexion, d’autant plus richement lorsque l’écrit est adressé aux camarades de classe (car il peut être lu). Il se développe une posture qui se situe davantage dans l’apprendre et non plus seulement dans le faire. (…) L’objectif général de cette expérimentation est de tester cette hypothèse de facilitation des apprentissages au moyen de l’écriture du journal des apprentissages. Il est demandé à l’enseignant de mettre en œuvre en fin de séquence un temps d’écriture du journal des apprentissages selon le protocole détaillé ci-dessous. La fois suivante, au début de la séquence suivante, ou le lendemain matin, les élèves sont invités à lire leurs journaux aux autres élèves et à en discuter ensemble de manière à effectuer un bilan avec ce qui a été fait et tisser des liens avec ce qui serait fait dans l’avenir immédiat. Ensuite, il est demandé à l’enseignante de collectionner les journaux d’apprentissage, des photocopies étant fournies au formateur – chercheur. Lequel pourra à l’occasion venir enregistrer (avec un seul dictaphone) les propos des élèves lors du débat après lecture des journaux d’apprentissages qu’il transcrira. L’objectif spécifique de l’expérimentation est de mesurer la plus-value réalisable dans les apprentissages des élèves, quelles que soient les disciplines d’enseignement. Afin de bien cerner les enjeux d’apprentissages, il est aussi demandé une copie de la fiche de préparation de l’enseignante de la séquence évoquée en journal des apprentissages. Dans le cadre de cette expérimentation, la tenue du journal des apprentissages n’est pas systématique pour toutes les leçons. C’est l’enseignant qui décide ou non de systématiser la tenue du journal des apprentissages ou bien de l’utiliser selon la plus-value d’apprentissage – enseignement observée, au coup par coup, selon l’importance des objets de savoirs enseignés. Un débriefing sera organisé avec l’enseignant en fin d’expérimentation (bilan oral enregistré). Comme variante, le journal des apprentissages peut aussi tenir la fonction d’un bilan de journée : en fin de journée, les élèves renseignent leur journal des apprentissages avec la somme des séquences qu’ils ont vécus. Qu’ont-ils fait dans la journée, comment s’y sont-ils pris et que retiennent-ils en fin de journée ? Cette expérimentation n’occasionne que peu de surcharge de travail pour l’enseignant.

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Voir le protocole de recherche - action du JDA


Exemple de livret JDA





Le déroulement général du projet JDA


1- Prévoir une copie de la préparation de la séquence/leçon
2- En fin de séquence, solliciter la réflexion des élèves sur ce qu’ils viennent d’effectuer : qu’avons-nous fait ? Comment ? Que retenez-vous ?
3- Demander ensuite aux élèves d’ouvrir leur « journal des apprentissages » pour effectuer un bilan sur ce qu’ils viennent d’apprendre. C’est une forme de débriefing sur le vécu scolaire. Nous faisons l’hypothèse que les élèves doivent prendre conscience de leur apprentissage, que c’est une étape nécessaire dans la construction d’un savoir. Ainsi les élèves synthétisent par écrit ce qui vient d’être fait, ce qu’ils ont retenu et compris. Les questions à poser auxquelles les élèves devront répondre sont les suivantes :
- Qu’avez-vous fait ? (Carte de réalisation)
- Comment avez-vous fait ? Quelles procédures avez-vous employées ? Quelles facilités ou points d’appui ? Quelles difficultés, quelles limites avez-vous rencontrées ? (Carte procédurale)
- Qu’avez-vous ressenti ? Qu’avez-vous aimé faire ? (Carte sensible)
- Qu’avez-vous retenu ? (Carte mnésique)
- Qu’avez-vous compris ? (Carte de compréhension)
- Qu’en pensez-vous ? (Carte critique)
- À quoi peut vous servir ce que vous avez fait ? (Carte pragmatique) - À quoi pouvez-vous relié ce qui a été fait/retenu/compris ? (Carte heuristique)
La notion de cartes évoquée entre parenthèses forme une catégorisation possible des rendus des élèves (journal des apprentissages).
- Naturellement, les élèves répondent aux questions auxquelles ils peuvent répondre et ils s’expriment avec leurs mots. Revenir à l’oral le lendemain, avec la lecture du journal de quelques volontaires, et en discuter avec leurs camarades complétera leur réflexion.
4- Le lendemain matin, demander à des élèves volontaires de lire leur journal des apprentissages et engager une discussion de classe (possibilité d’enregistrement audio des propos des élèves). 5- Scanner ou photocopier les journaux d’apprentissages des élèves en vue de leur étude approfondie par le formateur – chercheur.
6- Débriefing d’expérimentation (entretien audio enregistré entre l’enseignant volontaire et le formateur-chercheur).
7- Conclusion formative, formalisation de l’expérimentation

Cette recherche formation forme un temps de formation et de recherche entre collègues quel que soit le statut et l’expertise, hors de tout cadre évaluatif. Le principe est d’expérimenter et d’analyser l’expérimentation et la manière pour l’enseignant de se l’approprier.
Les résultats obtenus seront partagés entre les participants, un site internet collaboratif sera ouvert. Selon les souhaits des participants, il est possible de travailler en groupe sur une formalisation, un accompagnement, un temps de formation plus important, selon le principe d’apprendre des « situations de travail », d’apprendre de son activité de classe, au moyen d’une distanciation prise sur son « agir » en classe.







Recueil de quelques articles



Journal des apprentissages ? Intérêt pédagogique (2009), un point de vue de l'Académie de Paris

source : https://www.ac-paris.fr/serail/jcms/s2_807413/journal-des-apprentissages-interet-pedagogique-2009

Le journal des apprentissages est tenu chaque jour : chaque soir, les élèves récapitulent par écrit ce qu’ils ont appris au cours de leur journée chaque matin, quelques-uns d’entre eux lisent leur journal à la classe qui en discute. Le dispositif simple, austère même, a des effets notables, lorsque les enseignants ont la patience de l’inscrire dans un temps long. Les débuts décevants de la mise en place, l’évolution Pendant plusieurs jours, plusieurs semaines parfois, les textes obtenus déçoivent : des listes d’activités, des emplois du temps presque.
L’enjeu de ces premiers écrits est apparemment bien modeste : structurer le temps scolaire en égrenant les tâches et en les catégorisant au sein de disciplines scolaires. L’enjeu paraît plus visible dans les discussions du matin auxquelles donnent lieu les écrits, car repérer de ce qui attache ensemble des activités, des savoirs, des discours, dans des logiques de disciplines, ne va pas de soi. Est-ce aussi dû à la difficulté à reconnaître, sous les tâches scolaires, les apprentissages que celles-ci permettent ? Au fur et à mesure que le temps passe, les écrits s’allongent, des savoirs sont évoqués ("j’ai appris", "j’ai compris"), et non plus seulement des tâches et des disciplines. Un point de vue personnel prend la place de l’énumération des moments de la journée, des choix sont opérés parmi les activités scolaires évoquées.
Intérêt pédagogique du journal d’apprentissage
Les enseignants des classes soulignent les bénéfices que tirent les élèves (et les enseignants eux-mêmes) de ce dispositif : récapituler de cette manière aide les élèves à mémoriser, non par une restitution systématique, mais en obligeant à organiser le savoir, à opérer des rapprochements avec ce qui a été étudié à d’autres moments, à comparer les contextes où un même savoir est apparu ; on trouve d’ailleurs, dans les journaux, nombre de considérations sur ce qui était nouveau et sur "ce que je savais déja " pour l’enseignant, repérer ce que les élèves ne comprennent pas qui lui a échappé ; faire des mises au point, apporter des compléments, voire modifier sa programmation, disposer de point de départ de débats, parfois approfondis, sur le sens de tâches et de savoirs appréhendés d’abord par certains élèves de manière isolée ou anecdotique, articuler écriture et débat oral : chaque élève écrit et fait pour son propre compte un effort pour penser sa journée en termes d’apprentissages. Mais au cours des discussions qui suivent, les confrontations amènent chacun à évoluer. Il n’est pas rare que des élèves complètent ou reviennent ensuite sur ce qu’ils ont écrit, sans pourtant qu’ils en aient l’obligation.
Écrire pour apprendre
La pratique du journal des apprentissages est une des illustrations possibles de l’écriture pour apprendre : à côté des pratiques d’écriture littéraire, il y a place à l’école pour de nombreuses pratiques langagières écrites, disciplinaires ou transversales. Traditionnellement, l’écrit conclut une leçon, par exemple par la mise au point d’un résumé que les élèves vont recopier, ou bien est utilisé à des fins de contrôle des connaissances. Le journal des apprentissages s’inscrit plutôt parmi les écrits "intermédiaires" qui accompagnent la construction même des connaissances, en provoquant un travail de formulation qui est en même temps un travail d’appropriation et de structuration de ces connaissances.
Stratégies développées chez les élèves
C’est par la pratique même de l’écriture et de l’oral réflexifs que les élèves construisent, petit à petit, une représentation de l’activité d’écriture du journal, en même temps qu’une représentation de l’activité d’apprentissage et de formation dans laquelle ils sont engagés. Cette activité au long cours les conduit à développer trois types de stratégies utiles pour apprendre : le journal amène à mémoriser, en répétant, en reformulant, en établissant des liens entre des savoirs, il favorise des stratégies de contrôle métacognitif en mettant au jour les manières de s’y prendre pour réussir ou en obligeant les élèves à toujours évaluer le point où ils en sont, ce qu’ils ont compris ou non, il développe enfin les stratégies d’élaboration qui consistent à intégrer constamment les savoirs nouveaux à des ensembles plus vastes. Par là, c’est le sens même des tâches scolaires qui se trouve constamment questionné. Non pas, comme on le croit parfois, pour mettre en évidence l’utilité d’un savoir, mais pour le situer dans un paysage plus vaste et dans une cohérence qui peuvent seuls lui donner sens et intérêt.
D’après Jacques Crinon, dans « Ouverture vers une nouvelle fenêtre Le journal des apprentissages », Échec à l’échec, 160 (mars 2003).

Écrire le journal de ses apprentissages de J. Crinon (e journal des apprentissages. Échec à l'échec, mars 2003)
L'objectif de ce travail est de faire un état des lieux des recherches orientées vers l'analyse du lien entre l'activité des élèves de classes primaires et secondaires, et leurs pratiques langagières écrites et orales. En effet, pour les auteurs, le langage ne constitue pas seulement un moyen d'enregistrer et de communiquer les résultats du travail et de la pensée, mais une de ses fonctions essentielles est de rendre possible cette activité même, de lui permettre de se développer, de s'intensifier et de s'organiser. Faire parler, faire écrire, dans la classe, c'est avant tout mettre les élèves en activité de manière particulièrement intense, leur permettre de réfléchir, mais aussi d'apprendre plus efficacement et parallèlement de se construire comme sujets scolaires. Toutefois, dans cette perspective, toutes les tâches d'écriture et toutes les formes d'interaction ne sont pas d'une égale efficacité. Les contributions analysent quelques-unes des conditions qui font que les pratiques langagières scolaires peuvent être inégalement " réflexives ". Elles éclairent, de ce point de vue, le rôle que peuvent jouer les décisions de l'enseignant, sa manière de concevoir les consignes et d'étayer les activités par ses interventions. Elles illustrent aussi, par de nombreux exemples, de la liste au portfolio, des écrits intermédiaires à la lecture feuilleton, quelques-uns des dispositifs pédagogiques et didactiques qui visent à faire écrire et parler pour penser et pour apprendre, appliqués à des objectifs aussi divers, entre autres, que la lecture littéraire, l'éducation civique, l'enseignement scientifique et la formation d'enseignants.

Abrégé du chapitre du journal des apprentissages :

Aujourd'hui, j'ai travaillé sur les fractions décimales. (Imen, 9 mars)
Cet après midi, j'ai appris à décomposer les fractions décimales en partie entière + partie fractionnaire. Exemple : 18/10 = 1 + 8/10 Au début, je n'ai pas compris, mais quand j'ai arrêté de bavarder, j'ai mieux compris. J'ai appris qu'il fallait parfois réviser à l'avance parce que Mme D. nous a fait une interrogation surprise en vocabulaire. (Imen, 27 mars)
Ce matin, en calcul mental, il fallait donner le triple d'un nombre, en même temps j'ai révisé ma table de 3. (Steffie, 3 avril)
Cet après midi, en sciences, on a lu des expériences de Lavoisier en 1777. La première expérience c'était un oiseau enfermé dans une cloche en verre remplie d'air. Au bout de 15 mn, l'oiseau a commencé à s'agiter et au bout de 55 mn, il est mort. Cet air qui avait été respiré par l'animal est devenu fort différent car l'oiseau qu'il a introduit ensuite est mort quelques instants après. Après, j'ai travaillé sur le sens propre et le sens figuré. Exemple prendre la porte => sens figuré car on ne va pas prendre la porte, on va l'ouvrir et sortir. (Steffie, 4 mai)
En sciences, j'ai travaillé avec Mr R. sur une feuille. Un monsieur avait fait des expériences avec des oiseaux. J'ai appris que les deux oiseaux sont morts par la suite de ces expériences. (Nicolas, 4 mai)
Aujourd'hui j'ai appris une des expériences de Monsieur Lavoisier. J'ai appris que l'eau de chaux contient du calcaire. J'ai appris à expliquer mon point de vue dans un problème. (Hatim, 4 mai)
28 mai 2001 Ce matin, j'ai lu mon cahier journal à la classe puis je suis passée à la grammaire. J'ai travaillé sur le COD J'ai appris que le COD pouvait aussi être un pronom et alors il est placé avant le verbe. J'ai corrigé les exercices. Puis, dans un problème, il fallait voir si c'était une multiplication ou une division. J'ai mis que c'était une multiplication parce qu'il y avait une phrase qui montrait que c'était une multiplication. (Édith)
Ces textes sont extraits de " journaux des apprentissages " que tiennent chaque jour les élèves de cinquième année (CM2) d'une école élémentaire de la banlieue parisienne... (1) Chaque soir, ils récapitulent par écrit ce qu'ils ont appris au cours de leur journée. Chaque matin, quelques-uns d'entre eux lisent leur journal à la classe qui en discute.
Le dispositif est donc simple, austère même. Ses effets n'en sont pas moins notables, lorsque les enseignants qui l'adoptent ont la patience de l'inscrire dans un temps long (2). Pendant plusieurs jours, plusieurs semaines parfois, les textes obtenus déçoivent. Des listes d'activités, des emplois du temps presque. Besoin de structurer le temps scolaire en égrenant les tâches et en les catégorisant au sein de disciplines scolaires. Repérer ce qui attache ensemble des activités, des savoirs, des discours dans des logiques de disciplines ne va pas de soi. C'est sans doute un des enjeux de ces premiers écrits apparemment bien modestes, enjeu plus visible dans les discussions du matin auxquelles donnent lieu les écrits.
Est-ce aussi la difficulté à reconnaître, sous les tâches scolaires, les apprentissages que celles-ci permettent ? Sans doute aussi. Au fur et à mesure que le temps passe, les écrits s'allongent (3), des savoirs sont évoqués (4) - " j'ai appris ", " j'ai compris " -, et non plus seulement des tâches et des disciplines, un point de vue personnel prend la place de l'énumération des moments de la journée, des choix sont opérés parmi les activités scolaires évoquées.
Les enseignants des classes soulignent les bénéfices que tirent les élèves de ce dispositif. Récapituler de cette manière aide les élèves à mémoriser, non par une restitution systématique, mais en obligeant à organiser le savoir, à opérer des rapprochements avec ce qui a été étudié à d'autres moments, à comparer les contextes où un même savoir est apparu. On trouve d'ailleurs, dans les journaux, nombre de considérations sur ce qui était nouveau et sur " ce que je savais déjà ". C'est aussi l'occasion, pour l'enseignant cette fois, de faire des mises au point, d'apporter des compléments, voire de modifier sa programmation. C'est enfin le point de départ de débats, parfois approfondis, sur le sens de tâches et de savoirs appréhendés d'abord par certains élèves de manière isolée ou anecdotique. Ainsi les journaux du 4 mai cités au début de l'article ont relancé la discussion sur les expériences de Lavoisier sur l'air évoquées par le texte lu en classe : que signifiait la mort des oiseaux dans ces expériences ? et, autre manière d'aborder la question, a-t-on le droit de sacrifier des animaux pour vérifier une hypothèse scientifique ? Moment d'argumentation où se constitue un langage commun, traduction et élément constitutif des acquisitions notionnelles ou stratégiques en cours.
Il faut donc souligner l'importance, dans ce dispositif, de l'articulation entre l'écriture et le débat oral. Chaque élève écrit et fait pour son propre compte un effort pour penser sa journée en termes d'apprentissages. Mais au cours des discussions qui suivent, les confrontations amènent chacun à évoluer. Il n'est pas rare que des élèves complètent ou reviennent ensuite sur ce qu'ils ont écrit, sans pourtant qu'ils en aient l'obligation.
La pratique du journal des apprentissages est une des illustrations possibles de l'" écriture pour apprendre " (Chabanne et Bucheton, 2002 ; Crinon, 2000 ; Delcambre, Dolz et Simard, 2000 ; Ducancel et Astolfi, 1995) : à côté des pratiques d'écriture littéraire, il y a place à l'école pour de nombreuses pratiques langagières écrites, disciplinaires ou transversales, intégrées à des démarches d'apprentissage de manière nouvelle. Traditionnellement, l'écrit conclut une leçon, par exemple par la mise au point d'un résumé que les élèves vont recopier, ou bien est utilisé à des fins de contrôle des connaissances. Le journal des apprentissages s'inscrit plutôt au nombre des écrits " intermédiaires " qui accompagnent la construction même des connaissances en provoquant un travail de formulation qui est en même temps un travail d'appropriation et de structuration de ces connaissances.
En fin de compte, le journal des apprentissages est un objet ambigu et ouvert, dont l'intérêt réside justement dans l'ambiguïté. Nous proposons une tâche complexe d'écriture, sans aucun modèle au départ ; nous partons des formulations spontanées des élèves ; nous provoquons une confrontation entre élèves, où l'enseignant lui-même joue un rôle important. C'est par la pratique même de l'écriture et de l'oral réflexifs que les élèves construisent, petit à petit, une représentation de l'activité d'écriture du journal, en même temps qu'une représentation de l'activité d'apprentissage et de formation dans laquelle ils sont engagés.
Cette activité au long cours les conduit à développer trois types de stratégies utiles pour apprendre. Le journal amène à mémoriser, en répétant, en reformulant, en établissant des liens entre des savoirs. Il favorise des stratégies de contrôle métacognitif en mettant au jour les manières de s'y prendre pour réussir ou en obligeant les élèves à toujours évaluer le point où ils en sont, ce qu'ils ont compris ou non… Il développe enfin les stratégies d'élaboration qui consistent à intégrer constamment les savoirs nouveaux à des ensembles plus vastes. Par là, c'est le sens même des tâches scolaires qui se trouve constamment questionné. Non pas, comme on le croit parfois, pour mettre en évidence l'utilité d'un savoir, mais pour le situer dans un paysage plus vaste et dans une cohérence qui peuvent seuls lui donner sens, et intérêt.
SOURCE : http://coditexte.creteil.iufm.fr/crinon/journ_app02.html#A1

Cahier (Portfolio) d’apprentissage par Yves Morin
SOURCE https://educavox.fr/formation/analyse/cahier-portfolio-d-apprentissage#.UhMFKNNh2Mw.twitter
Outil d’excellence pour les évaluations - « ... apprendre c’est simultanément faire et se regarder faire, penser sa pensée, avoir consciencede sa conscience » Michel Develay Le cahier d’apprentissage est-il un outil permettant aux étudiants de développer des régulations métacognitives, une meilleure autonomie et une meilleure estime de soi ? Dans le cadre de ma pratique, il est fort difficile d’évaluer les répercussions de cet outil pédagogique sur les apprentissages de mes élèves. Tant de variables entrent en jeu, non ? Ce que je sais c’est que le cahier d’apprentissage est clairement considéré comme une alternative à l’évaluation plutôt traditionnelle et un moyen de lutter contre l’échec scolaire ou d’aider les étudiants plus faibles. Plus encore, son utilisation m’apparaît un excellent moyen d’enseigner aux étudiants l’autorégulation, d’opérer la régulation nécessaire aux apprentissages, et surtout ; au transfert de ceux-ci.
Nous le savons, la métacognition est une composante essentielle du processus d’apprentissage. Processus où l’étudiant apprend s’il est motivé, en traitant des informations, en utilisant des stratégies, en interagissant avec ses pairs et avec le soutien de l’enseignant mais aussi ; enétant conscient de ce qu’il fait et en le contrôlant. Mon rôle consiste donc à susciter l’apprentissage intentionnel, à tenir compte des acquis de mes étudiants en les aidant à faire des liens et à organiser l’information, à enseigner des stratégies de façon explicite en soutenant leur personnalisation, à faire interagir ces derniers et à soutenir leur métacognition.
C’est en tenant compte de ce processus d’apprentissage que j’ai considéré l’usage du cahier d’apprentissage dans mes cours depuis 2005. L’évaluation finale _ plutôt traditionnelle des cours_me posait aussi des difficultés depuis quelques années et en ce sens, le cahier d’apprentissage m’a permis de proposer à mes étudiants une alternative de remplacement intéressante et nouvelle.
L’usage de la métacognition et du cahier d’apprentissage dans mes pratiques pédagogiques tient, essentiellement, aux deux problématiques et à l’hypothèse suivante : Première problématique : Faire travailler mes étudiants significativement et leur apprendre à s’assumer comme apprenant, à se responsabiliser, à s’autoréguler et à s’impliquer. À être plus autonome car « il faut que l’élève apprenne à se passer des appuis affectifs et des systèmes d’assurance psychologique liés au formateur. » (MÉRIEUX, P. Éduquer : un métier impossible ? ou « Éthique et pédagogie, Pédagogie collégiale, Septembre 1992, Vol.6, n0 1, P 37.) Deuxième problématique : Trouver une solution de remplacement aux évaluations finales traditionnelles et, dans bien des cas, non productives. Hypothèse : Des chercheurs comme Noël, Romainville et Wolfs identifient plusieurs variables autour desquelles l’étudiant pourrait construire ses connaissances. Ces variables sont sa personne, les tâches, les stratégies cognitives, les stratégies métacognitives, les stratégies motivationnelles, les objectifs visés et les représentations initiales.
Il me fallait donc trouver un outil pédagogique qui m’aiderait _ partiellement tout au moins _ à répondre aux deux problématiques tout en respectant l’hypothèse de Noël, Romainville et Wolfs sur la construction des connaissances. Après plusieurs lectures sur le sujet de la métacognition, il m’apparut clair que l’usage du cahier d’apprentissage serait une solution valable à mon défi. Voyons maintenantcomment et pourquoi.
A. Le cahier d’apprentissage pour apprendre à mes étudiants à s’assumer comme apprenant, à se responsabiliser, à s’autoréguler et à s’impliquer. À être plus autonome. Pour s’assumer comme apprenant, pour se responsabiliser, s’autoréguler, s’impliquer et devenir plus autonome, je crois que l’étudiant doit d’abord et avant tout faire montre d’une prise de conscience. En terme pédagogique, cette prise de conscience fera référence à une attention cognitive consciente de l’étudiant face à sa démarche d’apprentissage. Nous retrouvons cette notion de conscientisation dans la définition même de la métacognition : « processus par lequel l’élève prend conscience des processus par lesquels il apprend. »
Source : http://discas.ca/Documents/TermesGlossaire.html
Il me restait donc à trouver la forme que prendrait cette prise de conscience. Quoi de mieux que le cahier d’apprentissage ? Mais attention, un cahier d’apprentissage significatif et non pas celui qui sert de ramassis des travaux de la session car il y a autant de portfolios différents qu’il y a d’enseignants et d’étudiants qui l’expérimentent.
Avec l’usage de mon cahier d’apprentissage, l’étudiant s’implique en travaillant 20 minutes à chaque cours sur ce dernier. Il se responsabilise s’il décide de quitter le cours pendant cette période de 20 minutes car il devra effectuer son travail sur le cahier seul à la maison, sans l’aide de l’enseignant tout en sachant que « de toutes les écoles fréquentées, c’est l’école buissonnière qui m’a paru la meilleure » (Anatole France). L’étudiant s’assume et se responsabilise en m’indiquant clairement dans le cahier, par exemple, quelle stratégie il utilisera pour reprendre un cours qu’il aura manqué ou pour mieux comprendre un atelier qu’il ne comprend pas. Il se responsabilise et est autonome en choisissant lui-même ce qu’il mettra dans le cahier pour me faire la démonstration de son apprentissage et de ses progressions. Il est autonome en choisissant lui-même les stratégies pour surmonter ses difficultés lors des ateliers en classe. Il apprend la régulation en anticipant les résultats visés par les ateliers en classe et en réfléchissant sur les stratégies que l’on utilise afin d’y parvenir. Il apprend aussi la régulation en contrôlant ou en vérifiant les difficultés qu’il rencontre et les facteurs émotifs reliés à l’atelier en classe. Les facteurs émotifs peuvent être un frein à l’apprentissage et l’étudiant doit les connaître. Finalement, l’étudiant apprend la régulation en ajustant ses stratégies en fonction des lacunes tant procédurales qu’au plan des connaissances liées à l’atelier ou à l’activité d’apprentissage. Autonomie aussi car en fait, le cahier d’apprentissage fournit l’occasion à l’étudiant de se développer au travers son cheminement personnel. L’étudiant est celui qui bâtit son cahier, il exerce ses choix et son droit sur le contenu, il représente ce qu’il est comme apprenant et ce qu’il devient. L’étudiant ne peut s’en remettre à d’autres pour décider de ce que sera la teneur du contenu. Évidemment, il doit suivre certaines règles mais au-delà de cela, il est libre. Le cahier permet aussi à l’étudiant de s’auto-évaluer, de porter un jugement, de réfléchir sur ses points forts et ses points faibles. Il y aresponsabilisation car l’étudiant doit décider quoi inclure mais aussi quoi ne pas inclure dans son cahier.
B. Le cahier d’apprentissage comme alternative à l’évaluation finale.
« Il se mit à étudier comme un homme se serait mis à boire, pour oublier » Valéry Larbaud Dans une approche socioconstructiviste, « évaluer c’est faire sortir ce qui est sain, c’est mettre en évidence le positif latent de l’élève, c’est cherché à en dire du bien. Évaluer pour évoluer ou faire évoluer ! » (RAYMOND, D, Qu’est-ce qu’apprendre ? ou Apprendre, oui mais ..., Recueil de texte II, Enseigner au collégial : fondements et défis, PED-875, Automne 2004, (Enseignante, Allaire, Hélène), page 190) Ainsi, dans le cadre d’une évaluation, il est légitime de : « ... présenter à l’élève une évaluation pertinente ... ; et de faire en sorte que l’évaluation prenne en compte les préoccupations actuelles qui visent à rendre l’élève actif dans sa démarche d’apprentissage et s’intéresser, en conséquence, aussi bien au processus qu’au produit » (RAYMOND, D, Qu’est-ce qu’apprendre ? ou Apprendre, oui mais ..., Recueil de texte II,
(Enseigner au collégial : fondements et défis, PED-875, Automne 2004, (Enseignante, Allaire, Hélène), page 190)
Alors si l’évaluation doit tenir compte de la démarche et du processus, le cahier d’apprentissage est donc une forme d’évaluation pertinente. Que l’on décide qu’elle soit formative ou sommative, cette forme d’évaluation contribue à mettre en évidence le positif latent de l’étudiant, c’est évident. Néanmoins, pour pouvoir utiliser le cahier d’apprentissage sommatif comme alternative à l’évaluation finale, il faut impérativement s’assurer de la qualité et de la pertinence des autres évaluations du cours. S’assurer que chaque étape d’apprentissage du cours sera évaluée et que l’étudiant maîtrise les contenus essentiels. Je préconise donc, selon le cours et la circonstance, soit une évaluation sommative de format « test » ou un travail pratique _ en équipe et/ou individuel _ significatif pour chaque étape du cours. J’utilise des travaux pratiques pour chacune des étapes de mes cours. Plus important et connaissant l’impact des modalités d’évaluation sur l’orientation que les élèves donnent à leurs apprentissages, il est essentiel que ces derniers connaissent de façon détaillée et ce, dès le départ _ dans les plans de cours _, comment s’effectueront les évaluations du cours. Et j’insiste à nouveau sur le mot détaillé. « Le paradigme d’apprentissage nous amène par ailleurs à porter une grande attention à la pertinence des pratiques évaluatives. En tenant compte du fait queles modalités et les contenus d’évaluation déterminent en grande partie l’orientation que les élèves donnent à leurs apprentissages, il faut rechercher un haut degré de cohérence par rapport aux finalités de l’évaluation dans un contexte axé fondamentalement sur la construction des connaissances et le développement des compétences. »
(TARDIF, Jacques, La construction des connaissances. Les pratiques pédagogiques, Pédagogie collégiale, Mars 1998, Vol 11, n.3, page 4)
Et en ce sens, l’usage du cahier d’apprentissage comme remplacement à l’évaluation finale _ mais combinée à des travaux pratiques complexes et significatifs pour chaque étape du cours _oriente parfaitement l’étudiant dans un processus d’apprentissage axé sur du positif et élimine le stress relatif à une évaluation finale axée sur la traditionnelle formule : « j’apprends par cœur et je répondrai au test pour oublier 7 jours plus tard en espérant avoir le plus de points. » Il faut modifier nos façons traditionnelles d’évaluer car les notes prises et les examens traditionnels de « par cœur » sur la théorie ne servent jamais de façons significatives. La seule différence entre nos étudiants qui réussissent et ceux qui échouent ; c’est qu’ils oublieront après l’examen plus tôt qu’avant. « Certes, je n’ai rien appris que je ne sois parti, ni enseigné autrui sans l’inviter à quitter son nid...Qui ne bouge n’apprend rien. » (Michel Serres, Le Tiers Instruit)
Le cahier d’apprentissage est donc un outil pédagogique et une méthode d’évaluation excellente pour encourager l’étudiant à quitter son nid et à bouger.
C. Le cahier d’apprentissage pour aider l’étudiant à construire ses connaissances autour des variables de Noël, Romainville et Wolfs.
Le cahier d’apprentissage est-il un outil pour nous aider à vérifier l’hypothèse de chercheurs comme Noël, Romainville et Wolfs ? Permet-il d’agir sur la personne, les tâches, les stratégies cognitives, les stratégies métacognitives, les stratégies motivationnelles, les objectifs visés et les représentations initiales ?
La personne
L’étudiant développe-t-il des connaissances relatives à lui-même en tant qu’apprenant ? La réponse est évidente. Il doit réfléchi sur son rythme d’apprentissage, sur ce qu’il aime ou non, donc sur sonstyle d’apprentissage. Il confirme ou infirme les facteurs affectifs qui l’empêchent d’apprendre oud’être motivé. À la limite aussi il découvrira les croyances ou valeurs qu’il adopte devant une tâche ou un atelier. Il connaîtra ses capacités de gestion et sa maturité face à un travail autonome.
Les tâches
L’étudiant élabore clairement ses connaissances à propos de la tâche à réaliser ou des notions nouvelles à apprendre : ses caractéristiques, son niveau de complexité, son ampleur, les exigences liées à la réalisation. Il procède et il analyse par comparaison entre ce qu’il savait et le nouveau savoir. Il réfléchi aussi sur la théorie : à quoi elle lui servira, son utilité dans la pratique de son futur métier, dans quel contexte il pourra l’utiliser, pourquoi apprend-il ces nouvelles notions.
Les stratégies cognitives
Bockaerts (1996) répertorie neuf stratégies cognitives générales : l’attention sélective, le décodage, le repérage, l’élaboration, la structuration, le questionnement émergeant, l’activation de règles et application, la discrimination / règles à appliquer et la mobilisation d’habiletés transférables. « Les stratégies cognitives sont des stratégies que le sujet utilise pour procéder à une organisation plus cohérente de ses conceptions et ce, en vue qu’elles soient plus efficaces pour comprendre les objets et les phénomènes. Si le sujet tente de mieux articuler ses conceptions de base, il devrait élaborer des représentations plus justes des objets et phénomènes » L’usage d’un cahier d’apprentissage adéquat permet clairement d’utiliser la plupart de ces stratégies cognitives. Pour n’en nommer que quelques une, rappelons que l’étudiant doit décoder _ dans le sens lexicologique de découvrir _ ses façons d’apprendre, ce qu’il aime ou pas, ses sentiments dans l’application d’une tâche, ses capacités de gestion d’une stratégie. Il doit aussi faire du repérage _ dans le sens lexicologique de balisage _ de ses limites comme apprenant, du meilleur chemin pour apprendre et il doit savoir baliser ce chemin. Clairement doit-il aussi élaborer _ dans le sens lexicologique de constituer ou construire _ son savoir à partir d’une réflexion et d’une comparaison entre ce nouveau savoir et ses connaissances antérieures. Il structure son apprentissage cours par cours, sa pensé face à l’apprentissage qu’il effectue, ses méthodes. ... etc.
Les stratégies métacognitives
Le cahier d’apprentissage est un outil métacognitif et en ce sens il permet à l’étudiant d’effectuer des opérations mentales sur des opérations mentales. Il y a clairement usage d’opérations de niveau supérieur puisque l’objet de connaissance est une opération mentale, non ?
Les stratégies motivationnelles
Dans les lexiques pédagogiques, il est dit des stratégies motivationnelles qu’elles forment un ensemble visant à maintenir la motivation initiale de l’étudiant. Bockaerts (1996) répertorie cinq stratégies motivationnelles.
Dans l’usage du cahier d’apprentissage comme alternative à l’évaluation finale, la plus importante de ces stratégies utilisées est celle qui fait de ce dernier un outil pédagogique visant à modifier l’effet d’un élément stressant _ l’évaluation traditionnelle de « par cœur » _ et ainsi à réduire considérablement l’aspect négatif des émotions engendrées par cette forme d’évaluation. Les étudiants connaissent l’inefficacité de cette méthode d’évaluation. Ils savent très bien qu’ils oublieront après 7 jours, posez leurs la question et vous verrez. Plus important encore, je crois que l’usage du cahier d’apprentissage permet de développer une intention d’apprentissage, ce qui est très motivant. L’étudiant reconnaît, par l’application de cette méthode pédagogique, l’importance que l’enseignant porte à la pédagogie de l’apprentissage plutôt qu’au « remplissage du verre vide ». Qu’il_l’enseignant _ lui fait confiance et lui permet de développer une autonomie et une stratégie décisionnelle face à son apprentissage. Que l’enseignant remet entre ses mains une portion de la responsabilité de son apprentissage et, pour un jeune adulte de 20 ans, cela est très motivant.
Les objectifs visés
C’est la première composante du cahier d’apprentissage que j’utilise pour mes cours. Nous le savons, en apprentissage, la connaissance des objectifs de la tâche _ ou du cours _joue un rôle central lors de la régulation que l’élève exerce et ce, à divers degrés et de différentes façons. Il est donc essentiel que l’étudiant apprenne à développer ses savoirs à propos des objectifs du cours globalement mais aussi de chaque cours individuellement. L’apprenant doit ensuite comparer ses connaissances acquises avec les objectifs et effectuer la régulation nécessaire s’il y a divergence.
Les représentations initiales
La réflexion sur les représentations initiales et les connaissances antérieures est partie intégrante du contenu de mon cahier d’apprentissage. Inutile de vous rappeler l’importance de cette réflexion en apprentissage. Les partisans des approches métacognitives intègrent systématiquement l’introspection, l’explicitation et la comparaison des représentations initiales face aux nouveaux savoirs comme démarche essentielle pour les étudiants. « ... le sujet- apprenant devra mobiliser son attention cognitive afin d’avoir accès à son système de représentations et aux conceptions sous-jacentes (Introspection). Il devra en faire une analyse critique, c’est-à-dire relativiser leur pouvoir explicatif (Objectivation) et l’expliciter (Évocation du savoir métacognitif). Prise de conscience qui devrait lui aider à entreprendre une démarche de réorganisation des conceptions sous-jacentes susceptibles d’entraîner une représentation plus juste de l’objet ou des phénomènes à l’étude (Régulation). »
(NOISEUX, G. (1995). L’apprentissage au centre de mes préoccupations. Conférence présentée au Colloque régional Québec- Chaudière-Appalaches, Québec : Université Laval, Faculté des Sciences de l’éducation.)

Le journal de bord de l'élève, par Alain Maillard
Description =
Méthode de travail consistant à tenir au fur et à mesure de leur déroulement, le relevé des activités accomplies, avec toutes les remarques pertinentes. Activité individuelle qui accompagne et reflète le cheminement et offre une trace des réflexions menées et des démarches entreprises. Un journal de bord est un cahier ou un carnet qu’on utilise pour prendre note de réflexions, de questions qu’on se pose, d’hypothèses qu’on émet ou encore d’émotions qu’on ressent. Explication des liens avec les théories de l'apprentissage. Le journal de bord permet de distinguer principalement 4 activités de base : noter des faits ou des observations se poser des questions émettre des hypothèses de base pour répondre aux questions que l’on se pose établir des liens. Le journal de bord permet d’accroître sa capacité à s’auto-évaluer. Cela permet d’amener l’apprenant à prendre conscience de sa démarche d’apprentissage et l’aider à comprendre la manière dont il apprend. Donc on fait appel au processus de métacognition qui joue un rôle clé dans la réussite scolaire.
Contextes appropriés
Le journal de bord s’utilise dans toutes les matières. Il peut-être utilisé dans un contexte d’expérience, d’une activité ou d’une situation vécue à titre de véhicule d’expression de réactions d’ordre affectif ou émotionnel. On peut aussi le retrouver à un niveau plus scientifique au cours d’expériences, de projets ou d’excursions.
Possibilités d'utilisation des technologies de l'information
On peut utiliser un cahier, un classeur ou un carnet. On peut aussi communiquer avec l’enseignant via l’ordinateur. Le journal de bord peut se faire sous forme de blog sur internet.
Avantages pour les élèves Permet de faire état de ses connaissances de façon objective. Permet de développer des stratégies métacognitives et se réajuster au besoin en gérant ses processus cognitifs. Permet à l’élève de jouer un rôle actif dans la construction de ses savoirs. Permet de prendre en charge davantage son apprentissage. L’élève apprend à porter un regard critique sur son travail. L’élève conserve des traces de ses apprentissages.
Désavantages pour les élèves
Le journal de bord peut ne pas convenir à l’élève qui s’exprime difficilement par écrit. Les aspects positifs sont aussi importants que les aspects négatifs à noter pour l’élève qui est réticent à les mentionner donc l’élève doit faire preuve d’objectivité dans la recension de ses écrits. L’obligation de passer par l’écriture peut laisser croire que l’on doit produire un texte d’une grande qualité et que l’on doit choisir ses mots pour respecter les règles du langage.
Avantages pour l'enseignant
L’enseignant apprend à connaître son élève. Le journal de bord a l’avantage de pouvoir individualiser la pédagogie. La distance permet paradoxalement le rapprochement grâce au journal de bord. L’enseignant peut repérer ce qui a été reçu et peut ajuster la suite de son intervention. Le journal permet d’évaluer la capacité à s’auto-évaluer.
Désavantages pour l'enseignant Le journal demande à l’enseignant beaucoup de temps pour répondre individuellement à chaque élève.



Focus sur le journal des apprentissages comme outil de débriefing scolaire



- Le journal des apprentissages est un cahier dans lequel les élèves indiquent par écrit le processus et le contenu de leurs apprentissages. Il participe de l’élaboration d’un temps de debriefing ou d’entretien d’explicitation (termes empruntés à l’ergonomie) sur les apprentissages effectués. - Ce journal est personnel, mais il peut fournir quelques informations à l’enseignant sur la cognition de l’élève : ses représentations, ses difficultés, son cheminement... devant un objet de savoir enseigné.
- Il apparaît que les nouvelles instructions relatives aux aides personnalisées en soirée peuvent être un endroit de réinvestissement de ce dispositif qui a fait ses preuves en certains endroits. - Il est aussi recommandé lors de la journée de classe comme une ponctuation entre les séquences d’apprentissage où là le journal d’apprentissage est communicable à la classe et peut devenir objet de débat argumentatif et moyen pour l’enseignant de prise d’information sur l’apprentissage en mouvement chez l’élève, et pour l’élève, un outil métacognitif, une mise en mot pour mieux interroger et penser les objets scolaires de savoir et in fine un outil pour mieux apprendre...
- Les objets scolaires (qui sont des objets à enseigner) sont des objets à interroger par les élèves. C’est ici qu’apparaît le phénomène didactique de secondarisation. - Secondariser, c’est pousser plus avant les élèves, les conduire à ne pas rester aux traits de surface de la tâche scolaire (relier des segments, calculer, remplir des trous...) mais à adopter une finalité supérieure, une intelligence supérieure de la tâche scolaire grâce à une décontextualisation de l’objet de savoir. Il faut amener les écoliers à sortir de leur conjoncturalité les objets scolaires (cf. les genres littéraires de Backtine) afin que ces mêmes objets travaillées dans les classes deviennent des objets d’interrogation, tout simplement des objets sur lesquels exercer une pensée.
- L’élève doit penser l’objet de savoir qu’il traite, hors du contexte des opérations qu’il a produit dessus, qui ne sont que des passerelles pour l’appréhender, pour le saisir dans sa dimension immatérielle.
- Penser l’objet conduit alors à le faire transiter de sa fonction naturelle d’usage à une dimension d’objet. Et c’est l’objet qui doit être compris et assimilé. Ainsi, il ne s’agit pas d’effectuer des divisions pour les divisions ou une version latine pour une version latine, ou encore une segmentation de phrase pour une segmentation de phrase. L’enjeu est ailleurs : il est épistémique. Dans un cas, il touche des aspects par exemple de partage des quantités, dans l’autre, d’analyse de fonctionnement de la langue. La version latine ne s’arrête pas à l’histoire de Jules César mais vise les compétences d’analyse de la phrase et de transposition. Derrière la tâche scolaire, il y a nécessairement un acte de pensée sur l’objet enseigné. Seule condition pour qu’il devienne un objet appris. Or, cette condition n’est pas automatique ; c’est une attente la plupart du temps implicite chez les enseignants. Nullement un comportement avéré chez beaucoup d’élève (cf. Bautier & Goigoux).
- C’est ici que peut intervenir le journal des apprentissages : un instrument pour conduire tous les élèves à penser les objets de savoir, un outil pour le maître afin de s’en assurer. Le Journal des Apprentissages peut s’intégrer dans la journée de classe ou dans l’après-journée d’aide personnalisée.
- Le Journal des Apprentissages est un instrument personnel pour l’élève. Il répond à un certain nombre de questions qui sont des jalons. Il n’est pas un document à évaluer par l’enseignant, mais un outil de prises d’information. Ces informations sont des leviers pour l’enseignant afin de relancer ou remanier un apprentissage dans la journée de classe. Ou un moyen de s’informer pour les soirées d’aides personnalisées sur la cognition d’un élève : ses capacités, ses difficultés, les malentendus face à un objet à apprendre. Pousser l’élève à penser l’objet enseigné par une mise en mots aussi imparfaite soit-elle est une opportunité pour comprendre la pensée de l’élève en mouvement, son processus d’apprentissage et du coup opérer la mise en place d’un dispositif de remédiation personnalisée.
- Pour résumer, il convient de faire en sorte que les élèves exercent des activités de pensée sur les objets scolaires qu’ils doivent manipuler. C’est faire transiter l’objet scolaire en objet d’interrogation pour qu’il devienne un objet de savoir appris. Le journal des apprentissages peut être le véhicule de cette transition.
Philippe Clauzard, 2007 ; tous droits réservés


Quelques retours d'expérimentations


Paroles d’expérimentateur. Ce journal des apprentissages a déjà été testé dans des classes de l’académie de Paris. Voici ce qu’en dit le site de l’académie. Le journal des apprentissages ? Quel intérêt pédagogique (2009)
Dispositif
Le journal des apprentissages est tenu chaque jour : · chaque soir, les élèves récapitulent par écrit ce qu’ils ont appris au cours de leur journée · chaque matin, quelques-uns d’entre eux lisent leur journal à la classe qui en discute. · Le dispositif simple, austère même, a des effets notables, lorsque les enseignants ont la patience de l’inscrire dans un temps long.
Les débuts décevants de la mise en place, l’évolution
Pendant plusieurs jours, plusieurs semaines parfois, les textes obtenus déçoivent : des listes d’activités, des emplois du temps presque. L’enjeu de ces premiers écrits est apparemment bien modeste : structurer le temps scolaire en égrenant les tâches et en les catégorisant au sein de disciplines scolaires. L’enjeu paraît plus visible dans les discussions du matin auxquelles donnent lieu les écrits, car repérer de ce qui attache ensemble des activités, des savoirs, des discours, dans des logiques de disciplines, ne va pas de soi. Est-ce aussi dû à la difficulté à reconnaître, sous les tâches scolaires, les apprentissages que celles-ci permettent ? Au fur et à mesure que le temps passe, les écrits s’allongent, des savoirs sont évoqués ("j’ai appris", "j’ai compris"), et non plus seulement des tâches et des disciplines. Un point de vue personnel prend la place de l’énumération des moments de la journée, des choix sont opérés parmi les activités scolaires évoquées.
Intérêt pédagogique du journal d’apprentissage Les enseignants des classes soulignent les bénéfices que tirent les élèves (et les enseignants eux-mêmes) de ce dispositif : · récapituler de cette manière aide les élèves à mémoriser, non par une restitution systématique, mais en obligeant à organiser le savoir, à opérer des rapprochements avec ce qui a été étudié à d’autres moments, à comparer les contextes où un même savoir est apparu ; on trouve d’ailleurs, dans les journaux, nombre de considérations sur ce qui était nouveau et sur "ce que je savais déjà " · pour l’enseignant, repérer ce que les élèves ne comprennent pas qui lui a échappé ; faire des mises au point, apporter des compléments, voire modifier sa programmation, · disposer de point de départ de débats, parfois approfondis, sur le sens de tâches et de savoirs appréhendés d’abord par certains élèves de manière isolée ou anecdotique, · articuler écriture et débat oral : chaque élève écrit et fait pour son propre compte un effort pour penser sa journée en termes d’apprentissages. Mais au cours des discussions qui suivent, les confrontations amènent chacun à évoluer. Il n’est pas rare que des élèves complètent ou reviennent ensuite sur ce qu’ils ont écrit, sans pourtant qu’ils en aient l’obligation.
Écrire pour apprendre
La pratique du journal des apprentissages est une des illustrations possibles de l’écriture pour apprendre : à côté des pratiques d’écriture littéraire, il y a place à l’école pour de nombreuses pratiques langagières écrites, disciplinaires ou transversales. Traditionnellement, l’écrit conclut une leçon, par exemple par la mise au point d’un résumé que les élèves vont recopier, ou bien est utilisé à des fins de contrôle des connaissances. Le journal des apprentissages s’inscrit plutôt parmi les écrits "intermédiaires" qui accompagnent la construction même des connaissances, en provoquant un travail de formulation qui est en même temps un travail d’appropriation et de structuration de ces connaissances. Stratégies développées chez les élèves C’est par la pratique même de l’écriture et de l’oral réflexifs que les élèves construisent, petit à petit, une représentation de l’activité d’écriture du journal, en même temps qu’une représentation de l’activité d’apprentissage et de formation dans laquelle ils sont engagés. Cette activité au long cours les conduit à développer trois types de stratégies utiles pour apprendre : · le journal amène à mémoriser, en répétant, en reformulant, en établissant des liens entre des savoirs, · il favorise des stratégies de contrôle métacognitif en mettant au jour les manières de s’y prendre pour réussir ou en obligeant les élèves à toujours évaluer le point où ils en sont, ce qu’ils ont compris ou non, · il développe enfin les stratégies d’élaboration qui consistent à intégrer constamment les savoirs nouveaux à des ensembles plus vastes. Par-là, c’est le sens même des tâches scolaires qui se trouve constamment questionnées. Non pas, comme on le croit parfois, pour mettre en évidence l’utilité d’un savoir, mais pour le situer dans un paysage plus vaste et dans une cohérence qui peuvent seuls lui donner sens et intérêt. D’après Jacques Crinon, dans « Le journal des apprentissages », Échec à l’échec, 160 (mars 2003).
Source : https://www.ac-paris.fr/serail/jcms/s2_807413/journal-des-apprentissages-interetpedagogique-2009


Références bibliographiques


- Chabanne, J.-C. & Bucheton, D., éds. (2002). Parler et écrire pour penser, apprendre et se construire. L'oral et l'écrit réflexifs. Paris : PUF.
- Crinon, J., éd. (2000a). Écrire pour apprendre. Cahiers pédagogiques, 388-389.
- Crinon, J. (2002). Écrire le journal de ses apprentissages. In J.-C. Chabanne et D. Bucheton (éds.), Parler et écrire pour penser, apprendre et se construire. L'oral et l'écrit réflexifs (pp. 129-143). Paris : PUF.
- Delcambre, I., Dolz, J. & Simard, C., éds. (2000). Dossier " Écrire pour apprendre ". La Lettre de la DFLM, 26, 3-31.
Ducancel, G. & Astolfi, J.-P., éds. (1995). Apprentissages langagiers, apprentissages scientifiques. Repères, 12.


Références sur internet
Un article d’Alain MAILLARD et de Jacques CRINON Fichier-pdf Le journal des apprentissages : quelle réflexivité ? (4 p.)
Journal des apprentissages, réflexivité et difficulté scolaire, un article paru dans la Revue Repères - recherches en didactique du français
Devenir élève avec le journal des apprentissages
Journal des apprentissages,par J. Crinon
Mémoire de Cafipemf de Anne Cécile Duffez
Journaux d'apprentissage - Pearltrees

Vidéos sur internet

Comment faire en sorte que les éleves réalisent que chaque jour ils apprennent des notions à retenir? Leur journee n'est ps un long fleuve tranquille, elle est ponctuée d'etapes d'apprentissage qu'ils faut qu'ils apprennent à reperer. D'où cet outil: le journal d'pprentissage, qui permet une conscientisation des acquis.


Monique Denyer, auteure de Version Originale (Editions Maison des Langues) nous présente le rôle du journal d'apprentissage dans cette méthode de français langue étrangère.






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